" Back then I didn't know why, why you were misunderstood,
So now I see through your eyes, all that you did was love"
So now I see through your eyes, all that you did was love"
Mama, The Spice Girls
Fin d'année dernière, vers novembre, je connais une période un peu spéciale. N'ayant pas très bien étalé mes jours de congés dans l'année, je me retrouve avec quasiment un mois de congés ininterrompu avec ma fille. Et cela m'angoisse. Je me rends compte d'ailleurs que si j'ai posé si peu de congés durant toute l'année c'est que je ne posais de congés que lorsque j'avais la possibilité de m'éclipser quelque part. Je me rends compte en fait, que d'être seule à la maison en présence de ma fille me terrifie. Littéralement. Je cherche avec frénésie à remplir mon emploi du temps d'activités, de visites et autres. Mais on est en plein mois de novembre et tout le monde bosse et le temps ne se prête guère à de folles aventures.
(Je
sais, à l'heure où je parle de pratiquer l'IEF, ça paraît
psychédélique. Même pour moi. Comme quoi j'ai fait un sacré
chemin en peu de temps).
Dans
le même temps, j'entame une série de rencontres avec des
sages-femmes pour anticiper mon projet d'accouchement puisque bébé
2 refuse de pointer son nez ; et de ces rencontres ressortent
beaucoup de choses. Je me rends compte qu'en fait, la dernière fois
que je me suis retrouvée seule à la maison pendant une longue
période hivernale avec mon bébé, c'était pendant mon congé
maternité. Une période que j'ai pour ainsi dire « pas très
bien vécu » (euphémisme). Et que ce qui m'angoisse à ce
moment ce sont les fantômes de cette période.
Je
réalise que si j'ai cru avoir dépassé ces moments, c'est
simplement parce que j'ai repris le travail.
Je
réalise aussi que je ne peux pas rester ainsi. Encore moins avec le
projet d'avoir un deuxième enfant.
(ça
c'était juste mon intro, là je vais parler du sujet mentionné dans
le titre).
Donc
j'en parle autour de moi, et une copine me dit : « Comment
ta mère a vécu son congé maternité ? » - « Je
n'en sais rien. » - « Tu ne lui en as jamais parlé ?
Il faudrait que tu lui en parles. ». Et là, bizarrement, ça
me gêne.
C'est
fou quand même, et si j'écris là-dessus aujourd'hui, c'est parce
que je suis certaine que nous sommes plusieurs dans ce cas.
Ce
qui avait mis la puce à l’oreille de ma copine c'est que quand
elle m'a demandé comment s'était passé ma naissance, j'ai
répondu : « Pareil que celle de ma fille, mais j'ai
eu du personnel plus compétent que ma mère».
Pareil... Oui, il doit bien y avoir des réponses à chercher par là....
Pareil... Oui, il doit bien y avoir des réponses à chercher par là....
Je
sais depuis que j'ai commencé à lire Filliozat que nous sommes
porteurs malgré nous de l'héritage du vécu de nos parents et que
cet héritage conditionne inconsciemment notre propre vie de parent.
Mais avant que je ne demande à ma mère : « Comment tu as vécu
ton congé après ma naissance ? », il a fallu que je prenne
mon courage à deux mains, que je prépare mes mots, j'ai essayé de
choisir un moment opportun. Bref, tout un drame. On aurait dit que je m’apprêtais à lui dire : « Maman, j'ai le sida » ou
un truc du genre.
Dans
la plupart des cultures dites « primitives » le savoir
lié à la maternité se transmet de mère en fille. Mais nous, dans
nos sociétés avancées, parfois en tous cas, nous n'osons plus
parler à nos mères. Comme si une espèce de tabou s'était
installé. Pour certaines, il s'installe même une sorte de réticence,
d'agressivité. « Ma mère me fait la morale » - « Je
me sens diminuée » - « Elle me croit incapable »
- « Elle est toujours en train de faire des commentaires pour
me dire comment je dois faire » - « Elle ne me comprend
pas ».
Je
n'ai pas ces problèmes avec ma mère mais je crois que, ayant choisi
des façons de faire différentes, je pensais.... Peut-être que l'on
était trop en décalage.
Mais
j'ai parlé à ma mère. Et ce fut une chouette expérience. Déjà,
ma mère a aimé parler de son vécu, ça se sentait. Je crois que
ça lui a fait plaisir que je lui demande. Je crois que nos mères
ont besoin d'échanger avec nous, de nous transmettre leur histoire
de mère, et que quand on ne leur en laisse pas l'occasion, certaines
le font « de force », maladroitement. « Mais enfin,
ma fille parle avec ses copines, lit des livres, rencontre des
parents mais à moi, elle ne me demande rien ? »,
peut-être que derrière des mères blessantes, il y a des mères
blessées, derrière des mères humiliantes, il y a des mères
humiliées.
Ensuite,
ça a énormément éclairé ma vie de mère. Je vous le donne en
mille, ma mère a vécu les mêmes angoisses que moi, pour les mêmes
raisons, et même, ma grand-mère maternelle également. Ça m'a
appris des choses sur moi. Et sur ma mère.
C'est drôle parce que je n'ai pas le souvenir d'une mère très câline. J'ai vécu des périodes très conflictuelles avec elle notamment à l'adolescence et si j'avais des choses à confier, j'allais voir ma grand-mère paternelle pour ça.
C'est drôle parce que je n'ai pas le souvenir d'une mère très câline. J'ai vécu des périodes très conflictuelles avec elle notamment à l'adolescence et si j'avais des choses à confier, j'allais voir ma grand-mère paternelle pour ça.
Mais
de revivre mes premiers instants de vie par sa bouche m'en donnait un
angle différent. Ma mère devenait pleinement mère, de l'image
sacrée de la Mère. J'ai tout simplement redécouvert ma mère, sous un autre angle.
Et j'ai pris conscience qu'elle m'a aimé comme j'aime ma fille et qu'à sa façon, elle aussi elle s'est battue. Que je ne fais que reprendre son combat mais en allant plus loin, parce que mon époque aussi me le permet. J'ai l'impression que ce chemin vers la bienveillance que je suis est un chemin trans-générationnel. Les valeurs que ma mère m'a transmise m'ont mises sur la voie et voici que, partant de ce point de départ, je vais plus loin.
Je me sens aujourd'hui plus proche d'elle, plus « connectée ». Bien sûr quand je lui parle de mes projets, elle est septique. Mais elle ne me reproche rien et je crois qu'à l'arrivée, elle comprendra que j'ai suivi le même chemin.
Et j'ai pris conscience qu'elle m'a aimé comme j'aime ma fille et qu'à sa façon, elle aussi elle s'est battue. Que je ne fais que reprendre son combat mais en allant plus loin, parce que mon époque aussi me le permet. J'ai l'impression que ce chemin vers la bienveillance que je suis est un chemin trans-générationnel. Les valeurs que ma mère m'a transmise m'ont mises sur la voie et voici que, partant de ce point de départ, je vais plus loin.
Je me sens aujourd'hui plus proche d'elle, plus « connectée ». Bien sûr quand je lui parle de mes projets, elle est septique. Mais elle ne me reproche rien et je crois qu'à l'arrivée, elle comprendra que j'ai suivi le même chemin.
Parler
avec sa mère - dans l'intimité bien sûr, dans un moment dédié, pas en plein repas de famille où il faut prouver que, montrer que...- c'est comprendre des choses sur soi, depuis le début
de notre vie jusqu'à aujourd'hui. Et comprendre l'héritage que cela
nous lègue, permet aussi de briser le cercle qui nous fait porter le
poids de blessures qui ne sont pas les nôtres, mais celles d'autres
vies avant nous dont nous héritons.
C'est
à la fois une délivrance et un rapprochement.
Et
ça fait du bien.
Parler
avec sa mère, sincèrement, en accueillant ce qu'elle a à dire, en
écoutant sans attente et sans jugement, c'est une belle expérience
dont il est dommage de se priver. Ce fut en tous cas la mienne.
Mamans
qui me lisez, lire des livres, échanger dans des papotes, voir des
conférences, rencontrer des gens, c'est bien. Mais n'oubliez pas de
parler avec vos mamans.
Ce texte me touche/remue/fait cogiter énormément !! Et puis, ton témoignage complète parfaitement la lecture de "Il n'y a pas de parents parfaits" que j'ai commencé depuis peu.
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