"Some kind of people, don't feel the same way,
Some kind of people, don't need your money,
I'm happier than you.
I have nothing,
and I've everything to do"
Quand nous évoquons
avec notre entourage, toutes nos idées de projet de vie, les
réactions sont quasi unanimement septiques. "Tu verras tu dis
ça, mais dans 3 ans ça sera retombé", " C'est trop de
boulot", "Là vous êtes motivés mais vous verrez...",
ou au mieux, une absence de commentaires et un petit sourire en coin condescendant qui en dit long.
C'est sûr que quand je regarde en arrière, nous n'avons
jamais ne serait-ce qu'effleurer ce genre de vie. Ma vie d'avant
était faite de jeux vidéos, de livres, d'expositions, de concerts,
de cafés entre potes, de projets associatifs : elle était
culturelle, nomade et citadine, c'est à peine si je vivais vraiment chez moi. Et là on parle de bottes en caoutchouc et de
tablier. Est-on de ces citadins utopistes qui s'imaginent une vie de
bohème qui se heurtera au mur de la réalité et qui feront
vite marche arrière pour retourner dans leur petit confort bien
douillé ?
D'une part, je suis toujours un peu déçue de constater à
quel point il n'est plus permis de rêver. Si encore nous nous étions
lancés dans un projet risqué dont la non réalisation aurait pu
nous porter préjudice, j'aurais compris qu'on s'alarme autour de
nous. Mais ce n'est pas le cas. Alors pourquoi n'entend-on pas plutôt
des : « C'est un beau projet, j'espère que vous y
arriverez. » ?
D'autre part, comme j'ai vécu un exemple de changement de vie
réalisé, il se trouve que mordicus, j'y crois.
A l'approche de la 50 aine, ma maman a fait un truc bizarre : ses enfants ayant quitté le nid ou étant en âge de le faire,
plutôt que de compter les jours qui la séparaient de la retraite et
de finir de payer tranquilou son emprunt immobilier pour couler des
jours paisibles dans son petit confort, elle a décidé de changer de
vie pour réaliser un rêve de longue date : acheter une ferme
pour y installer des chambres d’hôtes et surtout, partir vivre à
la montagne et y élever des ânes et des chèvres.
Inlassablement pendant des années, elle a monté son projet sous
les remarques de mauvais augure en tout genre. « A ton
âge ? », « Et si ça ne marche pas ? »,
« Mais pourquoi ? », « La campagne à votre
âge c'est risqué », « Mais tu vas te relancer dans un
projet pareil alors que ta maison est bientôt payée ? »
etc. A ma connaissance, quasiment une seule personne a réellement et inconditionnellement
soutenue ma mère à coup de « Tu déchires ! Vas-y
fonce ! Je peux t'aider en faisant ça, et ça, et ça ! » : moi. Pour moi, ma mère était devenue
une héroïne.
Même mon père fut plus que difficile à convaincre, lui qui
pourtant n'est jamais aussi bien qu'en travaillant avec ses mains et
en pleine nature.
Je crois que ce qui a déstabilisé tout le monde, c'est que ma mère s'est positionnée à l'opposé total de l'idéal factice qui nous incite à penser que l'aboutissement de la vie c'est d'accéder à un confort et une sécurité matérialiste. On a réussi sa vie quand on coule des jours dans la passivité la plus crasse et sans se soucier de son porte-monnaie. Alors qu'elle était en passe d'y parvenir, elle a préféré tout remettre en question et prendre des risques pour vivre son rêve. Pour la plupart des gens, c'était impensable, voire dangereux.
Aujourd'hui, après moult galères, ces chambres
d'hôtes existent (vous les trouverez ici et n'hésitez pas à
y faire un tour!) et mes parents vivent dans un havre de paix au
milieu des montagnes où ils cheminent vers une vie authentique
tournée vers le local, le convivial et le naturel. Il ne manque que
les ânes et les chèvres.
Et surtout, mes parents n'ont jamais été aussi heureux.
Ma mère réalise son rêve, alors on pouvait s'y attendre.
Mais mon père....
Mon père fit le lycée agricole dans le but de travailler dans
les eaux et forets. Je n'ai jamais trop compris pourquoi ni comment,
il a fini dans un bureau où il s'est senti obligé de rester pour
subvenir aux besoins de sa famille. Adolescente, j'ai un jour demandé
à mon père pourquoi il ne quittait pas son travail qui le minait
tant pour faire autre chose. Il m'a rétorqué : « Et
comment tu crois que je vais payer vos études, vos vacances, la
maison et tout le reste ? ». Car sans être riche, nous avions
une maison assez grande, avec de grandes chambres, j'avais même ma
propre salle de bain, je ne manquais de rien, nous avons fait des
activités extra-scolaires, j'ai pu faire des études longues et nous
partions en vacances presque touts les ans. Mes parents ont, à force de travail, de sacrifices et de bonne gestion, réussi à nous faire vivre dans un confort de vie croissant. Je n'ai pas osé lui
répondre à l'époque que j'aurais volontiers abandonné tout ce
confort pour que mon père vive mieux, je pense qu'il ne m'aurait pas
cru.
Et pourtant, étant gamine, ce qui me faisait rêver c'était
nos séjours à la campagne. J'ai tout un tas de souvenirs de
frustration de n'avoir jamais eu de cabanes dans les arbres, de tipi,
de ne pas pouvoir comme en vacances sortir pour jouer dans le
ruisseau du coin ou à l'orée de la forêt. Je ne suis pas sûre que
j'avais tant besoin de tout ce confort matérialiste que ça. Je ne suis pas certaine d'avoir toujours été une citadine dans l'âme. Simplement j'avais fini par intégré l'idée que c'était mieux. Si ça se trouve, c'est aujourd'hui que je me rapproche le plus de mon karma.
Quand mes parents ont déménagé, mon père a dû cesser son
activité pour s'occuper de la maison. Le changement fut... Radical.
En moins d'un an, toute la famille s'accordait à dire que mon père
était transcendé. Aujourd’hui il vit sans aucun revenu depuis
presque 7 ans, mais je crois que pour rien au monde il ne reprendrait
sa vie d'avant.
Quant à moi, voyant à quel point mon père qui devenait aigri,
réac, ronchon, s'est révélé dans toute sa sagesse et sa
générosité, je ne me suis dit qu'une chose : « Papa,
pourquoi tu ne l'as pas fait avant ? J'avais raison il y a des
années : j'aurais volontiers troqué tout notre confort de vie
pour avoir à mes côtés un père comme celui que tu es
aujourd'hui ».
Mon père a fait l'erreur de penser que nous avions plus besoin
d'être gâtés par l'argent que d'avoir un père heureux.
Aujourd'hui, je n'ai pas envie d'attendre que mes enfants soient
grands pour oser vivre autrement et selon mes convictions. C'est ici
et maintenant que je veux tenter l'aventure, avec eux et pour eux.
Nous cheminons, nous avançons, chaque pas que nous faisons
qui nous rend meilleurs pour nous, nos enfants, la planète est un
pas précieux. Peu importe que nous arrivions à tout faire, à tout
réaliser. De plus, nous ne sommes pas utopistes au point de croire
que tout se fera vite. L'essentiel n'est même pas le résultat
mais la démarche.
Mais j'espère pouvoir un jour, comme ma mère l'a fait, revenir
vers ses gens qui nous croient fous et pouvoir leur dire : "Je
l'ai fait, et je ne regrette rien". Prouver que c'est possible. Pas
forcément simple, mais possible. Pour semer des graines dans
l'esprit des gens et que eux aussi, se reprennent à s'accorder le
droit de rêver.... Et d'y croire.
Ah le changement fait peur et ceux qui te disent ça sont peut être très envieux mais n'osent pas contrairement à vous!! Tu as eu de la chance d'avoir un si bel exemple devant toi... ça donne des ailes!
RépondreSupprimerVivez vos rêves, nous n'avons qu'une vie!!
Quand j'ai lu ton projet de jardin, de maison, je n'ai rien dit car en fait... j'ai les mêmes projets, un jour ! Mon mari est un peu dans les mêmes croyances que ton père, mais je sais que patiemment nous y arriverons !
RépondreSupprimerJe suis vraiment très heureuse que ton projet s'amorce, et y travailler vous donnera de la force, un esprit hors du commun. Le père d'une amie très proche a acheté un bout de terre en ruine, j'avais 6 ans quand j'y allais pour jouer. Aujourd'hui, c'est un paradis... Volonté, bonté, allez-y ! Tous mes vœux vous accompagnent !
Ton mari a pourtant la main super verte non ? Je me rappelle d'un article sur ton jardin, il était assez impressionnant.
SupprimerOui, il a la main verte, c'est clair ! Les récoltes (quoi que peu abondantes en tomates) sont impressionnantes mais dans un jardin ouvrier. En fait, je parlais d'habiter dans un endroit entouré de verdure, avoir un grand espace vert autour de chez soi... En ile de France, quelle misère ! Nous rêvons de nous installer en province et de trouver une maison-projet, des racines... Mais je viens de diviser mes revenus par deux (voir par trois !) en devenant prof des écoles... Partir, veut dire pour mon homme se reconvertir, et ce n'est pas une mince affaire !
SupprimerAh oui ! J'avoue que moi j'ai dézingué ma carrière en ne voulant pas y aller en IdF... :$. Après on trouve des beaux endroits partout.
SupprimerNous on s'est assis sur les Vosges faute de perspective professionnelles. ll faut être honnête, notre projet est beau mais c'est parce qu'aujourd'hui on a de "bonnes" (capitalistiquement parlant) situations qu'on peut le réaliser. C'est un projet de nantis en fait ^_^.
il y aura toujours des gens aigris par leur frustration, ou des personnes jalouses de n'avoir pas oser...il faut du courage pour aller au bout de ses rêves, et il faut de l'inspiration pour rêver, ce n'est pas donner à tout le monde! autour de toi , moi je vois beaucoup de considération et d'enthousiasme par rapport à ce projet qui se concrétise, concentre toi la dessus, c'est ça qui porte!
RépondreSupprimerDans la famille oui, c'est assez positif en somme, mais je crois que l'expérience de ma moman y est pour beaucoup. Preuve d'ailleurs que l'on plante des graines quand on force le destin.
SupprimerPour certaines personnes, je crois que c'est surtout une question "d'habitude" (pas le bon mot mais...). Quand je parle de mes habitudes de vie au boulot par exemple, je passe vite pour une... pas une dingue mais... une marginale. Pour beaucoup vouloir vivre avec des toilettes sèches c'est incompréhensible. Une de mes collègues ne comprenait même pas que je n'aille pas au restaurant tous les mois sans que ça me manque. Pour elle une maison avec jardin c'est garage automatique, gazon - piscine et terrasse pour les barbecues. Quand je lui parle maraîchage bio, activités nature, poules et tout le tintouin, je lui parle d'une autre planète.
Pour l'anecdote, la propriétaire de la maison nous a dit à la première visite : "Oh ben vous vous entendrez bien avec les voisins, ce sont des hippies comme vous !" ^_^.