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lundi 28 septembre 2015

Transmettre ses valeurs

Je vous parlais au mois d’août de notre achat de maison qui était particulièrement significatif pour nous puisque cela représente un élément important de la transmission de valeurs que nous voulons pour nos enfants. C'est donc un sujet qui m'interpelle pas mal en ce moment et je dois dire que l’approche des 3 ans de Minimog m'a donné l'occasion de quelques pavés dans la mare qui m'ont donné matière à réflexion.

J'en citerais un qui peut paraître anecdotique mais qui semble trouver un écho chez de nombreuses mamans : la première séance « shopping » de Minimog.
Le fait de la laisser choisir ce qu'elle veut porter est une liberté individuelle que je tiens à respecter envers ma fille (dans la mesure du raisonnable – pas de tongs et petite robe en plein hiver évidemment...). Ayant constaté que ces derniers mois ses goûts s'étaient bien affirmés en la matière, quand il a fallu sortir le carton de vêtements 3 ans je l'ai laissé trier ce qu'elle voulait mettre ou pas (on me donne beaucoup – trop – de vêtements, donc j'ai ce luxe). Le tri fut si drastique (elle avait éliminé tous les pulls, l’hiver approchant, c'était gênant) que je me suis retrouvée avec 2 choix : soit lui imposer certains vêtements, soit en racheter d'autres, alors même que j'avais sous le coude de quoi répondre à ses besoins (pas ses envies, nuance) sans débourser d'argent. Quel principe devait peser le plus lourd dans la balance : mes valeurs de consommation raisonnée, ou le respect de sa liberté de choix ?
Mami'nie ayant proposé de lui offrir sa première « séance de shopping » pour ses 3 ans, j'ai opté pour la deuxième solution ce coup-ci. Le résultat fut assez déroutant : nous sommes revenues avec une garde robe intégralement ROSE (flashy) et bourrée de Reine des neiges (un héritage de l'école je suppose, ma fille n'ayant jamais vu le film), d'Hello Kitty, de Fée clochette, et consors.
Je me suis rappelée qu'il y a 3 ans, je me gaussais de ces parents qui disaient qu'ils étaient « obligés » d'acheter ce genre de vêtements. A les entendre, des mots clefs me sautaient immédiatement à la figure comme « merchandising », « consumérisme », « stéréotype ». Quand j'entendais certaines personnes me dire qu'il « Faudrait bien qu'un jour j'en passe par là », ça me faisait enrager. Et dieu sait que nous avons tout fait pour ne pas exposer notre fille à ce genre de stéréotypes sexués et au piège des marques en tout genre (même si j'ai été une grande fan d'Hello Kitty quand ça n'était encore que ce petit chat Kawai connu des seules adeptes de la pop culture japonaise).
Et pourtant, quand ça m'est tombé dessus, j'ai choisi de jouer le jeu jusqu'au bout. J'ai bien essayé le coup du : « Tu peux choisir entre ça et ça, lequel tu préfères ?», la réponse était « rien » et j'ai choisi de respecter cela.
En ce moment, je multiplie les dilemmes de ce genre : faut-il accepter cette cabane et ce toboggan en plastique que l'on me donne en sachant qu'elle va les adorer, ou m'en tenir à ce jardin ludique naturel qui me tient à cœur ? L'approche des 3 ans de ma fille et personne qui ne nous sollicite pour les idées cadeau me fait craindre le pire... Et que dire de ces discours qui naissent dans sa bouche depuis quelques temps du style : « Ça c'est pour les garçons, ça c'est pour les filles ». Bref, tous ces petits rien qui viennent grignoter l'idéal de vie que je m'étais construit pour elle, la faisant entrer dans tout ce tas de stéréotypes dont j'espérais la protéger. 


Que faire ? Avec le recul, je crois que seuls 2 choix s'offrent : soit je choisis de la protéger du monde, soit je lui permets de s'y confronter, au risque qu'elle prenne des chemins qui ne sont pas les miens.

Je dois dire que le premier choix est plus que tentant. Dieu sait que tous ces gens qui choisissent des voix « alternatives » m'inspirent de la compréhension, du respect, et de l'envie. Il se dégage de leurs expériences un parfum de paradis perdu qui donne envie de faire de même, furieusement. Peut-être y viendrais-je moi aussi un jour.

Mais aujourd'hui, j'ai fait le deuxième choix.
Comme je le disais à propos de l'école, malgré mes réticences, je tiens à ouvrir ses horizons. Je le fais depuis sa plus tendre enfance : sa vie et la mienne sont faites de mouvements, de rencontres, de découvertes, de nouveautés, même quand c'est moche.

Et puis, en réfléchissant à ce sujet, m'est revenu en mémoire l’histoire du prince Siddhartha (futur Bouddha). La légende raconte qu'il passa une grande partie de sa vie au sein d'un château où il connaissait la richesse et l’opulence et on le préservait de l'image de la souffrance. Un jour qu'il décide de sortir des ces murs, il découvre un vieillard, un malade et un mort, trois états qu'il ignorait jusqu'alors. Le quatrième était un sage vivant chichement, dont la sérénité évidente le mis sur la voie de l'illumination.
Ça m'a beaucoup parlé et inspiré.

A vouloir protéger ma fille des méfaits du monde, ne risquerais-je pas de la priver aussi de certains de ces bienfaits ? Après tout, j'ai du mal à penser que moi seule ait les moyens de lui ouvrir les voies vers les chemins qui lui conviennent. Mes choix ne seront peut-être pas toujours les siens.

Je me suis aussi replongée dans mon propre vécu.
Enfant, j'ai joué avec des Barbies : stéréotypes abjectes et superficiels d'une image de ce que devrait être une femme aux yeux de la société moderne, qui aujourd’hui me colle des frissons. Mais je n'ai moi-même jamais vu ces poupées comme des exemples à suivre mais comme des sujets d'aventures et d'imitation. Ma Barbie à moi était tour à tour une maman ou une princesse aventurière qui tuait des monstres avec son miroir magique, pas une bimbo qu'on se contente d'habiller et ré-habiller à l'envi.
Pré-ado j'ai connu une courte mais intense période de fanitude pour les boys-bands, 2 ans plus tard je découvrais avec passion la musique metal qui m'a ouvert les portes d'une culture musicale riche, variée, et je pense, plus profonde et ouverte que la moyenne des gens.
Ado, je rentrais à la maison pour m'avachir sur le canapé et regarder des séries à la télé. Ça ne m'a jamais empêché de m'engager pour des causes diverses dès que j'en ai eu les moyens.
Jeune adulte, j'étais capable de passer 300 heures sur un jeu vidéo, 10 heures par jour presque non stop. Et pourtant je lâchais tout pour aller faire du bénévolat au resto du cœur, dans un refuge pour animaux, une association culturelle, ou simplement boire un coup avec des potes ou aller chez Charlie pour refaire le monde en écoutant Orange Blossom ou Debout sur le zinc (<3) .
Etc.

Mes parents m'ont toujours laissé traverser ces périodes sans m'en dissuader et j’imagine que tout n'a pas dû leur plaire ni les rassurer. Mais ils m'ont laissé vivre mes expériences, ils m'ont fait confiance. On discutait beaucoup, je connaissais leur point de vue, mais ils ne me l'imposaient pas (enfin, on avait nos règles à la maison ! N'allez pas croire non plus que j'étais laissée uniquement à mon libre-arbitre).
Ma plongée dans le metal et ma période stylistique noire par exemple ont pas mal inquiété mes parents. Ma mère un jour en a discuté avec moi, exprimant son ressenti face aux posters qui envahissaient ma chambre avec ces symboles sombres et ces types en noir à tête de barbares pas très avenants (je suis issue d'une famille catholique pratiquante qui plus est). Je m'en rappelle comme si c'était hier. J'ai expliqué à ma mère ce qu'il en était pour moi, et je lui ai dit que je trouvais ça super honnête (j'ai du dire « cool » à l'époque) qu'elle ait la franchise de me le dire. Que je comprenais ses inquiétudes et j'y ai répondu.
(Pour l'anecdote, par la suite ma maman est devenue une féroce pourfendeuse de préjugés anti-metal et 13 ans plus tard mon frangin l'emmenait voir un concert d'Alice Cooper ^_^)

Et je dois dire que je suis heureuse d'être devenue la personne que je suis aujourd'hui. Je le dis sans prétention parce que je sais surtout pertinemment à quoi et à qui je le dois. Je le dois beaucoup à toutes les belles valeurs qui constituent mon héritage familial et qui m'ont été transmises malgré tout. Valeurs que j'ai adoptées, contournées, rejetées parfois, pour y revenir et être celle que je suis aujourd'hui, dont j'estime que je n'ai pas à rougir.

Alors soit, ma fille veut du rose partout, ma fille chantonne « délivréééée », ne veut que des copines, pas des copains, sera sûrement bardée de cadeaux plus ou moins à notre goût à son anniversaire, et mon jardin ressemblera en partie à un catalogue de supermarché.... Bon. Tant pis.
Je reste là, à ses côtés, porteuse de ce que j'ai à lui offrir mais la laissant libre de traverser ses propres phases de découvertes. Je me dis que si mes choix sont sensés et bons, un jour où l'autre, elle y reviendra. Et elle y reviendra parce qu'elle sera convaincue et pas parce qu'elle n'aura jamais rien connu d'autre.

A ce sujet, mon père m'a dit un jour : « Ton grand-père disait souvent : « Plantes ta graine, elle poussera. » ». Je le crois. Je plante, j'arrose, et le reste lui appartient.

5 commentaires:

  1. Vaste question et vaste dilemme!!!
    Pour la part j'ai choisi la première solution au maximum tant qu'elles seront petites... En premier lieu, mon dilemme fut pour la nourriture, elle est essentielle à mes yeux et oui je protège mes filles de la société consumériste et de tous les produits nocifs que l'on veut nous faire avaler.
    Je sais que je me heurte un jour où l'autre à un "retour de manivelle", mais pour le moment j'explique nos choix et je laisse de temps à autre le droit de choisir une culotte princesse ou les pyjamas, le droit de manger un BN sucré avec de l'huile de palme et j'en passe, le droit de regarder la télé, le droit d'avoir un jouet en plastique qui fait du bruit, le droit de prendre une tartine de vrai Nutella chez les copains... mais TOUJOURS j'explique pour quoi nous n'avons pas fait ces choix pour elles tant qu'elles ne sont pas en âge d'être informées à juste valeur (vêtements étiques, publicité, produits chimiques, ....) et je leur explique que plus tard elles feront leur propre choix quand elles seront en mesure d'avoir un esprit critique...
    Je pense les laisser choisir au plus vite et essayer tant bien que mal de leur faire confiance , il faudra bien de toutes façons mais pour le moment je les trouve trop petite encore pour les laisser sans explication dans la jungle de la société!
    On en reparlera dans quelques années, souvent je m'imagine mes filles mangeant au Mac Do tous les midis et regardant la télé en rentrant de l'école ... et là je me dis que j'aurai eu tout faux!!!!

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    1. Je trouve ta démarche très intéressante et constructive.
      Mais ton post me fait penser à quelque chose dont j'ai oublié de parler dans mon article. Quand il s'agit en effet de lui faire comprendre pourquoi il n'y a pas de bonbons à la maison, pourquoi on ne peut pas manger de la mayonnaise à tous les repas, pourquoi le temps de télévision est limité, pourquoi on lutte contre le gâchis, je n'ai aucun problème. Mais au moment de lui dire "non plutôt la robe grise en laine que celle rose avec Minnie", quel argument j'ai ? J'explique à ma fille de 3 ans que je n'ai pas envie qu'elle réponde à des stéréotypes consuméristes ? Alors qu'il y a de grandes chances que elle ne voit tout simplement pas les choses ainsi parce que sa vision même du monde n'en est carrément pas là. Parce que honnêtement, ça, c'est mon regard d'adulte. Le vrai motif c'est que ça ne ME plait pas.

      Si, j'aurais pu avoir un argument de consommation raisonnée en l'emmenant dans un magasin de vêtement éthique, et en lui expliquant qu'on ne choisis que ici parce que....
      Mais à partir du moment où j'ai accepté que ma mère l'emmène au supermarché (après tout, c'est elle qui offre).... A qui ça fait vraiment du mal qu'elle s'habille comme ça ? A elle.... ou à moi ? A moi qui n'ai pas envie que l'on me voit en présence d'une petite fille rose bonbon et que l'on se dise, comme je me le disais il y a peu envers d'autres que je joue le jeu de la consommation.
      Je pose une vraie question sans avoir la prétention d'en détenir la réponse mais si je suis honnête avec moi-même, je crois que c'est plus mon égo qui en pâtit que sa construction intérieure. Je sens que ma fille en passe par une étape de mimétisme, comme il est normal à son âge, et je suis certaine qu'elle saura en sortir un jour, même si c'est dans 15 ans. Mais que le problème qui vient de l'image que ça renvoie, c'est plutôt le mien.

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    2. Oui pour les habits, c'est un autre sujet en effet ... ne jamais dire jamais ;-) Je n'ai pour le moment pas trop lutter en même temps ma fille avec son caractère de Zébrion ne supporte pas les magasins. Je couds beaucoup .... je récupère un max (argument de choix, j'hérite tt de même du pyjama Hello Kitty que je lui laisse) , bref, j'évite le pb! Mais si elle devait aller choisir sa tenue dans un magasin, effectivement je la laisserai libre de son choix (et puis ej le cacherai au fond de l'armoire ;-))))) Non c'est une blague!!!)

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    3. Et le rose bonbon, j'ai lâché prise .... j'ai deux bonbons roses à la maison,j'ai fini par accepter ;-)

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    4. Et moi j'adore tes cousettes ! C'est vrai que si je cousais, je pourrais aussi offrir de jolies tenues à ma fille qui feraient consensus. J'ai appris aussi à m'habituer au rose bonbon et finalement, ma fille est toujours belle comme elle est, peu importe l'emballage. ;-)

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