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mardi 9 juin 2015

Allaitement et biberon : stop aux étiquettes !

Lassée de lire des articles, commentaires ou témoignages qui nous ramènent au stérile débat sur les « pro » et les « anti » allaitement, je ressens le besoin de me lancer dans cet article paradoxal qui est à la fois un coup de gueule et un appel à l’apaisement.

Je suis une maman allaitante, une allaitante de compét’ même : presque 3 ans d’allaitement qui perdurent au long de ma grossesse et je n’ai aucun a priori sur le fait de potentiellement allaiter deux enfants à la fois. Je participe à des réunions de la Leche League de temps à autre, je participe aussi au groupe de discussion et d’échange facebook de mon antenne locale et j’ai écrit des articles sur l’allaitement.
Pour autant, je ne me sens pas et me revendique encore moins comme une « pro-allaitement »

Déjà, parce que je ne vois pas comment on peut être « anti-allaitement ». Allaiter c’est normal, c’est naturel. La classification scientifique qui fait de nous des mammifères est basée sur notre capacité à nourrir nos petits avec le lait produit par leurs mères, donc pour moi, être anti-allaitement reviendrait à dire je suis « anti-oxygène », « anti-sommeil » ou « anti-bipedisme ». Donc s’il n’y a pas d’ « anti », comment peut-on avoir des « pro » ???

Ensuite, parce que si j’allaite c’est par plaisir, pas par militantisme.
Mon opinion est que, la raison n°1 qui fait qu’on allaite ou non, c’est avant tout le feeling, pas les recommandations de l’OMS. Les recommandations OMS c’est le machin qu’on balance au médecin qui nous snobe du haut de son doctorat parce qu’il vient d’apprendre qu’on allaite depuis plus de 6 mois, histoire de lui renvoyer un argument médico-scientifique à la tronche pour le faire tomber de son piédestal. Ou l’argument qu’on donne à l’entourage quand on a pas envie de justifier nos choix personnels et intimes. Mais ce qui fait qu’on allaite ou non, au fond, c’est le bien-être qu’on en tire.

Partant de là, il y a des femmes qui n’ont jamais eu envie d’allaiter et c’est normal.
Certaines allaitent un peu et elles n’y trouvent pas l’extase attendue, promise par les allaitantes épanouies donc elles arrêtent vite et elles ont le droit.
Certaines ont des allaitements compliqués ou douloureux et ne veulent pas d’un allaitement calvaire ; elles n’en sont pas moins méritantes que celles qui choisissent d’endurer candidoses et mastites à gogo, qui elles, ne sont pas esclaves de leurs enfants.
Certaines voudraient allaiter mais n’y parviennent pas et elles doivent être (ré)confortées et soutenues dans leur rôle de mère maternante.
Certaines décident d’allaiter jusqu’au sevrage naturel (qui arrive rarement à six mois, hein?) et elles sont normales aussi.
Certaines allaitent un, deux, voire trois enfants en même temps et elles sont tout aussi saines d’esprit que les autres.

Allaiter c’est faire plus que nourrir, c’est une communion, donc justement, un allaitement forcé (pour la mère ou l’enfant) n’a pas de sens. Allaiter pour se donner bonne conscience, pour moi, ça ne rime à rien.
De plus, l’allaitement ne fait pas tout. Il y a des tas de façons de materner et d’entrer en relation intime avec son enfant autres que celles-ci.

Ce sont mes convictions profondes, alors honnêtement, ça me fait vraiment chier, d’être assimilée -même indirectement - à une « toquée de l’allaitement », une « extrémiste » ou une « pro » je sais pas quoi pour le simple prétexte que j’allaite beaucoup et longtemps et sans me cacher.

Si je participe à la chaîne d’information sur l’allaitement c’est par solidarité, pas par revendication ou par sectarisme.
J’estime qu’une femme en France au 21ème siècle doit être en mesure d’allaiter si elle le souhaite et aussi longtemps qu’elle le souhaite et comme elle le souhaite. Or trop d’allaitements sont gâchés par le manque d’information, la désinformation, le manque de soutien, le mépris, le jugement. Alors oui, ça me tient à cœur d’aider les mamans en difficulté à aller au bout de leur projet d’allaitement. Pourquoi faut-il que dans la tête de certain(e)s ça fasse de moi, et de toutes les mères dans mon cas quelqu’un qui par défaut, porte un jugement négatif sur celles qui n’allaitent pas ou peu ?

Quand j’entends ou lis encore des conneries qui décrivent les associations de soutien à l’allaitement (et pas PRO-allaitement) comme des groupes sectaires de nanas extrémistes qui veulent que le monde entier allaite jusqu’à 5 ans, ça me fait bondir ! Ces gens-là ont-ils jamais mis un orteil dans une réunion allaitement ? Parce que moi, oui, et le discours a toujours été : vous prenez ce que vous voulez. Et soi dit en passant, du soutien est aussi donné aux mamans qui souhaitent arrêter d’allaiter.

Oui, j’allaite librement et en public. Sans m’exhiber pour autant, voilà bien longtemps que je ne cherche plus à cacher le moindre bout de peau de ce sein qu’on ne saurait voir quand j’allaite dans l’espace collectif, parce que, oui j’estime que je n’ai pas à me cacher et que les gens doivent réapprendre à voir des mères allaiter pour que ce ne soit plus tabou. Des nichons s’étalent sur les plages, les affiches, les pubs, les films, les clips vidéos, alors je refuse qu’on me prenne la tête avec un téton qui dépasse le temps de mettre mon bébé au sein.
Pour autant je ne cherche pas à exhiber mon nichon comme un étendard à ma fierté d’allaitante.
Je ne suis pas fière d’allaiter, je suis heureuse d’allaiter : parce que j’aime ça et que j’ai eu jusqu’ici la chance de pouvoir vivre tous ces beaux moments avec ma fille. Je ne le vois pas comme une source d’orgueil dont je pourrais me gausser mais une source de joie.
Oui, je revendique fermement le droit d’allaiter comme je l’entends, mais non, merde non, je ne suis pas convaincue pour autant que ça fait de moi une meilleure mère que les autres ou je ne sais quoi.
Ne peut on affirmer l’un sans que l’on nous impose de sous-entendre l’autre ?

Dans le même genre, le fait que je veuille accoucher sans péridurale et que je milite pour plus de liberté dans le choix des accouchements ne me pousse pas à mépriser les mamans qui prennent une péridurale de confort. Après un accouchement boucherie cauchemardesque (le mien) ma mère a vécu un accouchement apaisé grâce à la péridurale qu’elle a demandée à un moment où celle-ci n’était pas remboursée. Et bien tant mieux ! Faudrait-il qu’un jour ont ait des extrémistes de l’accouchement naturel ?

Pourquoi nos choix de mères, qui ne regardent que nous et nos enfants doivent-ils être vus comme des étiquettes quasi politiques sur la bonne façon d’être mère ?
Pourquoi le fait d’avoir des convictions assumées doit-il conduire à penser que nous méprisons celles et ceux qui font autrement ?

Arrêtons par pitié de nous coller des étiquettes et de nous mettre systématiquement dans la bouche des discours qui ne sont pas les nôtres et qui nous montent les unes contre les autres ! On est assez jugées et méprisées comme ça (une mère, ça ne fait jamais bien, c’est bien connu) pour ne pas en rajouter là où il n’y a pas besoin.

Oui les extrémistes de tout poil existent mais franchement, je ne crois pas que l’on soit si nombreuses que cela à revendiquer nos choix comme des vérités absolues.
Ne peut-on partager et échanger dans toutes nos différences pour s’enrichir mutuellement sans que ce dialogue devienne forcément source de vexations en tout genre ?

Apprenons à faire la part des choses :
Dire que de ne pas allaiter c’est adopter un comportement irresponsable et mettre en danger la vie de son enfant c’est un jugement (et une aberration).
Dire que le lait maternel est plus bénéfique à l’enfant que le lait en poudre, c’est une information (et une vérité).

Doit-on arrêter de dire la vérité pour ne vexer personne ?
Quand l’information est-elle devenue une forme d’agression ?

N’y a-t-il pas parfois, de la part des personnes qui se sentent jugées un réel malaise qu’elles-mêmes ressentent à l’intérieur ? Une frustration qui ressort et que l’on apaise en fustigeant l’autre de vous juger alors que soi-même on se juge ?

Alors je vous entends déjà « Oui, mais toi tu dis ça mais moi j’ai entendu des remarques super méchantes à mon égard parce que j’allaitais / j’allaitais pas » et je vous crois.

Eeeeet j’arrête là mon coup de gueule pour passer à l’apaisement.

De même qu’il convient de modérer nos frustrations, surveillons nos mots.
Et je dis nous parce que je m’adresse autant à moi qu’à vous. Moi la première, j’ai sûrement déjà pris la mouche sans raison, j’ai sûrement eu des mots blessants sans le vouloir et oui,plein de fois en voyant un nourrisson au biberon ça m’a « fait bizarre » (sincèrement, pardon à toutes les mamans qui ont biberonné des nourrissons : vous êtes belles avec vos enfants).

« Nan mais attends, tu vas pas me dire que t’allaites encore ? »
« Un biberon ? Ah non mais t’es folle ! T’as vu ce qu’ils mettent dedans ! Et puis mettre un bout de plastique entre moi et mon bébé, ça non ! »
« L’autre jour j’ai vu une maman allaiter un gosse de 18 mois, tu te rends comptes ? Y en a qui sont graves quand même ! »
« Y a pas à dire, une photo de bébé au biberon, ça n’a rien d’aussi touchant qu’une photo d’un bébé au sein. »
« Nan mais allaiter 2 enfants en même temps ! Quand même ! »
« Nan mais ne pas du tout allaiter son enfant, même au début ! Quand même ! »
« Si il pleure tout le temps c’est que tu l’allaites trop, t’es trop disponible pour lui. »
« Si il pleure tout le temps c’est que tu l’as pas allaité, t’es pas assez présente pour lui. »

Nous ne savons pas qui nous avons en face de nous. Nous ne connaissons pas toujours, rarement même, l’histoire, les blessures, l’intimité des personnes à qui nous balançons des remarques acerbes, parfois sans faire attention.

Franchement : tétées, biberons, l’essentiel c’est l’amour que l’on met dedans. 

Minimog, 2/3 mois allaitée par maman, biberonnée par papa : point commun, la même dose d'amour dans les deux.
 

11 commentaires:

  1. les remarques sur l'allaitement, sur le nombre d'enfants qu'on a (toujours trop ou pas assez), sur l'espace entre les enfants (idem)...et (comble du comble) sur le fait de s'occuper de ses enfants en étant mère au foyer.
    J'entends ces remarques comme des sanglots, sanglots de mamans qui auraient aimé et qui n'ont pas pu.
    Toutes les remarques les plus vaches que j'ai entendu sur le fait d'être au foyer venaient d'amies qui ont voulu (en posant des congés mat) et pas pu (trop dur et elles ont écourté le congé mat ou fait garder les enfants). Alors j'entends leur peine et je ne me formalise pas.
    Chloé

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  2. je ne suis pas certaine que toutes les remarques proviennent de maman qui auraient voulu ... il y en a qui en veulent pas, ce n'est pas leur truc et elles ne comprennent pas ... leur priorité est ailleurs et c'est tout!
    et comme Hélène, je ne juge pas même si je défends bien évidemment l'allaitement long, l'accouchement naturel , le portage, les couches lavables , le cododo... mais chacun fait comme il veut et comme il peut avec son histoire, son héritage et sa confiance...et effectivement le principal reste l'amour que l'on donne à ses enfants!!! bel article...

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  3. On critique rarement gratuitement, et moi je ne défends rien.
    Dans tous les cas où j'ai reçu des remarques, pour connaître bien les personnes (parcours et pas le genre à critiquer) je sais que c'était l'expression d'une souffrance.
    La souffrance n'est pas rationnelle et elle s'en fiche de savoir que le bib est aussi bien pour l'attachement de l'enfant que le sein.
    Chloé

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    1. Morceaux choisis :
      "Alors, le prochain dans 1 an? Faut arrêter les lapins ! La contraception ça existe" venant d'une amie habituellement subtile, qui n'arrive pas à concevoir le 2ème
      "Moi je ne pourrais pas rester à rien faire, être toujours enfermée au même endroit (lol, là c'est carrément une projection de leur vie de bureau, car la femme au foyer n'est pas enfermée chez elle!), j'ai besoin de stimulation intellectuelle etc" venant d'amies qui ont abrégé leur congé mat et qui toutes les trois ont fait une dépression à ce moment là et étaient désemparées de ne pas réussir à tout gérer, je m'en souviens très bien ayant fait de l'écoute active pour chacune
      "Nan mais en avoir autant c'est n'importe quoi, c'est de l'élevage " venant d'une amie dont le compagagnon ne veut pas de 2 eme et qui en souffre (idem elle m'a souvent parlé de cette souffrance)
      Et pour l'allaitement j'ai tout eu (lait pas assez riche, trop riche qui provoque des coliques, et des "mais arrête !" Des que j'avais des difficultés) venant de ma mère qui n'a pas réussi à allaiter. Elle me demande toujours un peu tendue " tu allaites encore ??!!!" "Euh oui, il a 6 semaines !!!!"
      L'expression de la douleur est tellement limpide que je ne peux pas leur en vouloir.
      Chloé

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    2. ah ouais il y a eu du lourd point de vue remarque par chez toi ;-))
      Bon au moins ça fait un peu sourire, mais effectivement là je crois qu'il y a souffrance ...

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    3. J'ai fait un jour le tour des mamans de mon entourage qui ont 4 enfants (pour moi 3 c'est pas une famille "nombreuse"), c'est affligeant ! Tour d'horizon des perles:
      - une collègue au supermarché, dans la file de la caisse la dame de derrière se met à compter ses enfants à voix haute. (la collègue a fini pour elle : "4, oui vous savez compter" et vlan ! ^_^)
      - tout ça pour les allocs (un gamin ça ne coute rien, ça rapporte, c'est bien connu)
      - c'est irresponsable, tout ça pour faire des futurs chomeurs (parce que quand on en fait qu'un il est promu à un avenir plus radieux ?)
      - bon tu t'arrêtes quand ? (pourquoi, c'est toi qui t'en occupes ?)
      - ils sont tous à vous ? (de quoi je me mêle ?)
      et ma préférée:
      - ils sont tous du même père ? (ma voisine, avec un type inconnu : véridique!) (là je me suis juste étranglée).

      Tu obtiens un bonus de bêtise si tu ne travailles pas et un autre si tu as des enfants rapprochés.

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    4. Oh j'adore le "ils sont tous du même père ?". Je crois que je serais restée les yeux écarquillés !

      3ème bonus de bêtise et irresponsabilité : en faire dormir deux (ou plus !) dans la même chambre. Alors que franchement, petits ils adorent, ça les rassure et chez nous ça a été la solution miracle aux problèmes de sommeil. Quand j'étais petite c'était commun de faire dormir des enfants dans la même chambre, maintenant c'est limite si les gens ne vous disent pas en face que quand on n'a pas la place et bah on fait pas autant d'enfants.

      Chloé

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  4. Vos échanges me rappelle que j'ai sur le feu depuis des mois un article sur les remarques. Je ferais bien de m'y remettre. ^_^

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  5. Merci pour cet article, si vrai... ce n'est pas simple de ne pas émettre de jugement sur un sujet si important pour tous, nos enfants...que ce soit pour celles qui allaitent ou pas!
    et j'en profite pour vous remercier pour ce blog :)
    céline

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  6. Très bel article ! J'en pense tout autant et là c'est très bien exprimé ! On se pose tant de questions pour essayer d'être la meilleure mère possible...

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  7. Je reviens (encore!) commenter.
    Il y a une situation, je trouve, où les remarques sont constructives, c'est quand l'allaitement se passe vraiment mal, au péril du bon développement de l'enfant. Quand par exemple, le bébé n'a pas repris son poids de naissance ou perd du poids, à 2 semaines voir à un mois ou plus. On sait que le premier mois de vie est très important pour la construction du cerveau et qu'une alimentation suffisante est importante. Dans le cas d'une mère qui s'entêterait à ne pas vouloir donner de complément, je pense qu'il est juste que l'entourage fasse des remarques.
    Chloé

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