Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...

lundi 1 août 2016

Papotte sur.... le jeu libre.

Cela fait un moment qu'on se dit avec Charlie que, le souci des blogs qui permettent de partager des idées entre parents, c'est qu'on y parle assez peu du jeu libre. On a eu envie de remédier à cela dans un article à 4 mains qui fait rebond entre nos points de vue et expériences.

Déjà, à quoi sert le jeu ? Ce qui est sûr c'est que le jeu n'a pas le même rôle ni la même signification pour un enfant que pour un adulte.
C'est par le jeu que les enfants appréhendent et apprivoisent le monde c'est pourquoi jouer librement pour un enfant c'est primordial. Par exemple, ma fille joue à mourir très souvent depuis que la mort a fait irruption dans sa conscience du monde. Bien sûr elle meurt mais elle se réveille après puisque dans le jeu, on peut. Mais elle meurt et je dois être triste. Je sens très clairement que par là elle intègre le vécu de la mort ; elle l'intègre comme un enfant de son âge : en le vivant dans son corps. Je sais intimement que ce qui se passe est très sérieux. Elle fait de même avec l'accouchement depuis peu d'ailleurs.


Le jeu n'a pas le même rôle ni la même fonction parce qu'on ne le conscientise pas de la même façon. Le jeu est une thérapie en soi. On propose aux malades d'Alzheimer de jouer parce que le jeu apporte de la résilience. Comme pour les enfants, il redonne confiance aux patients, et puis ils ravivent la mémoire, suscite des connexions, fait travailler le mental.
Les animaux aussi jouent. Les petits entre eux ou avec leur mère et ils apprennent de cette manière toutes les aptitudes qui sont nécessaire à leur survie. Doser leur force, appréhender les réaction de l'autre, communiquer. Des animaux privés de jeu s'isolent, ne se reproduisent pas , ils sont incapables d'appréhender de manière codifiée les règles sociales et peuvent devenir dangereux pour eux et les autres.

Le jeu libre est passé par différentes phases chez nous. D'abord de façon uniquement moteur, en jouant avec son corps et  sa mobilité, puis on est passé à une phase plus intellectuelle dans laquelle le jeu permettait de rejouer des scènes, de comprendre des moments de vie passée. Il rejoue des accidents, ma (sa?) séparation, la mort de notre chien etc...tous les grands moment forts (et marquants) passent dans le jeu et sont réinterprétés, réappropriés pour les rendre plus acceptables. Aujourd'hui on entre dans la phase de narration, où le jeu est bien plus élaboré, plus construit encore. Il raconte des histoires, et parfois m'invite avec des "on dit que" à rentrer dans son histoire ou juste à l'écouter et c'est riche, que c'est riche!

Depuis que j'ai lâché prise avec Minimog, son penchant pour le jeu libre a explosé. Je sais qu'elle entre dans le jeu parce qu'en général, à brûle pourpoint et quelque soit le contexte ça commence par : "Viens maman on disait que....". Des "on disait que..." j'en mange 50 par jour. Mais je suis hallucinée de voir tout ce qui ressort de ces jeux imaginés.
J'ai parfois du mal à trouver l'enthousiasme quand j'entends pour la 250ième fois du mois : "Viens maman on disait que t'étais une sorcière...". J'ai été 697 fois un dragon méchant, puis gentil puis méchant, 1368 fois une sorcière méchante puis gentille, puis méchante, 634 fois une maman éplorée ou en colère ou que sais-je. Les scénari de base sont toujours les mêmes.
Mais quand je prends le temps de rentrer dans le jeu, je aussi suis toujours bluffée à la fin par tout ce qui en est ressorti.
Mime et incarnations diverses, connaissances des animaux, des plantes, rires, vocabulaire enrichi, compréhension du monde, langue étrangère,  motricité et sport, rires, chants, imitation, imagination et créativité, rires (oui j'insiste sur le rire mais le rire c'est primordial)....

J'ai remarqué autre chose que ce soit dans mes échanges avec les autres mamans sur ce sujet (via l'Arbre à Noyaux), ou en observant les gens autour de moi. C'est que pour un adulte jouer n'est plus naturel. On n'ose plus jouer ou on ne sait plus comment faire. En emmenant mon fils à la plage j'ai vu un nombre incroyable de parent, pour ne pas dire tous, amener leurs enfants au bord de l'eau leur tendre des jouets et rester là à attendre, le visage terne, même pas en maillot de bain, non, habillé normalement de sorte qu'il n'y a aucune possibilité de se laisser aller à la tentation. Ça m'arrive aussi parfois, vraiment je n'ai pas envie et puis au bout d'un moment, aller!, je lui cours après juste histoire de dire que, et là, je finis par m'y prendre. Il suffit parfois juste d'un rire pour tout lancer. Grimper aux arbres, sauter, courir, s'attraper ça n'est pas réservé qu'aux enfants et ça ne se pratique pas que dans des lieux spécifiques comme des parcs aventures ou je ne sais quoi. Et c'est tellement bon.......

Je me reconnais dans ton témoignage. Et ça m"inspire la remarque que pour beaucoup de parents le jeu passe par du matériel, voire qu'il se résume aux jouets. Mon mari dit souvent à ma fille :"Mais t'as plein de jouets et tu joues pas avec !", le plus souvent quand il n'a pas envie de l'avoir dans les pattes. Mais chez l'enfant le jeu naît d'un rien et déborde sur la vie quotidienne. On peut l'intégrer dans de multiples situations. 
Il est dommage aussi que l'on surcharge les enfants en matériel, y compris dans leurs jeux, je trouve que ça laisse moins de place à l'imagination. On multiplie les acquisitions pour varier les jeux mais au final, je trouve qu'on cloisonne à des propositions concrètes et limitées tout ce qui pourrait émaner de la tête de nos enfants.
Il est dommage aussi que les jouets se substituent souvent à la présence humaine, autrement plus riche. Surtout que les enfants, en particulier les tout jeunes ont souvent besoin pour jouer d'une "présence affective". Pas d'être seulement physiquement là mais dans le jeu, avec eux, ce qui n'empêche en rien l'adulte de vaquer à ses occupations, et même d'y intégrer l'enfant par le biais du jeu.

Ça ne veut pas dire non plus qu'on doit tout le temps jouer avec son enfant, rentrer dans son jeu, non mais on peut le nourrir un peu , partager un temps avec lui et le laisser à son plaisir, jouer librement. Et pendant ce temps, on peut jouer librement de notre coté aussi :-)
 
Et puis ce n'est pas toujours facile d'être honnête, parce qu'on a pas toujours envie de jouer. Alors faut il se forcer à jouer? En ce qui me concerne, à partir du moment où il n'y a plus d'authenticité, de motivation, j'arrête. Mais ça ne m’empêche pas d'être présente. D'être juste là, tout en continuant à discuter par exemple mais je suis là et je reste réceptive. C'est ce dont il a besoin: de savoir que je suis là pour lui. Un peu comme quand il me dit qu'il veut téter alors que ça fait 3 semaines qu'il ne l'a plus fait. A chaque fois je lui dis " d'accord, viens!" et ....il ne tête pas. Il avait juste besoin d'être rassuré sur l'ordre des choses.

C'est vrai, on a pas toujours envie, et il ne s'agit pas de faire croire à l'enfant que l'on est toujours à sa disposition pour jouer seulement selon ses règles à lui. Mais je constate aussi que si parfois je ne suis pas motivée pour rejouer encore au même jeu, quand je me fais violence, comme tu le racontes plus haut, souvent je finis par entrer dans le jeu et si la base est toujours la même, je suis toujours surprise de ce qui en ressort.
Et puis parfois je constate aussi que quand Minimog est "dans mes pattes" et réclame ma présence avec insistance, prendre le temps de jouer un peu avec elle -mais jouer vraiment- répond à son besoin et souvent elle finit par aller jouer seule, à nos côtés ou dans sa chambre.

Il est vrai que ces moments où l'enfant joue seul, sans aucune intervention de l'adulte sont primordiaux pour sa construction intérieure. Et ce, dès le plus jeune âge. Avec Minimog j'étais hyper présente (trop!) : je pensais que l'on devait tout le temps occuper un bébé, tout le temps "faire des choses" avec un bambin - et elle en garde sûrement les traces aujourd'hui, mais pour Raoudi, je constate que quand il a eu sa dose de contact et d'attention, je peux tout à fait le poser quelque part et le laisser faire sa vie tout seul.


Oui, parfois il faut aussi pouvoir se sentir seule, se sentir libre de jouer seul. Je me souviens d'une séance avec la psy, la première en fait, pendant laquelle pour la première fois Petit Chou a joué librement sans moi alors qu'à la maison il ne me laissait rien faire seule, et ne faisait rien seul, il était toujours dans l'attente de quelque chose. Rapidement j'ai compris que ce changement d'attitude ne venait pas de lui mais de moi. J'étais pleinement, entièrement à autre chose et j'étais sereine avec ça. Le fait de pouvoir être librement occupée à autre chose que lui lui a permis de pouvoir être pleinement occupé à autre chose que moi.

D'ailleurs, c'est une notion de plus en plus (ré)admise : l'enfant apprend par le jeu, c'est même la façon la plus efficace pour lui d'apprendre et la seule dont il dispose instinctivement (honnêtement, la pédagogie c'est un truc d'adulte).
Que fait un enfant si nous le laissons faire  ? Il joue.
André Stern révélait l'absurdité de notre société qui a dissocié le "travail" : important, valable, sérieux et le "jeu" : loisir, superficiel, oisif. Jouer c'est devenu un gros mot. Mais ce faisant on passe à côté d'un principe essentiel de l'apprentissage des enfants.

Je crois que l'enfant apprend toujours. Si le jeu est naturel, apprendre l'est aussi à partir du moment ou l’intérêt est suscité. Quand on propose une activité à un enfant, quand on lui propose un "travail", pour lui ça reste du jeu à partir du moment où ça correspond à ses intérêts du moment, à ses "périodes sensibles".  Bien qu'occuper son temps à préparer des activités sans oser se laisser de temps libre, soit plus à notre profit qu'à celui de l'enfant. Pour ma part, prévoir des activités m'a surtout permis d'essayer de maintenir un équilibre, de trouver une place dans ma famille chamboulée par la maladie et la mort, de ne pas penser, de fuir. A partir du moment où je ne pouvais plus que faire face, je n'ai plus proposé d'activités, c'est mon fils qui m'a invité et j'ai commencé à vraiment en profiter parce que je n'attendais plus rien.  
Ce qui est sûr, c'est qu'aucun de nos actes vers nos enfants n'est neutre, il sera toujours chargé de notre propre expérience. On va se donner l'impression de légitimer notre rôle, on va panser nos plaies, vivre par procuration une autre enfance...jusqu'à ce qu'on arrive à lâcher prise, à trouver un équilibre. Et c'est là que le jeu libre devient intéressant, et pas seulement pour l'enfant!

Pour ma part, chez nous le jeu libre a pris une place énorme. Je constate d'ailleurs l'inutilité des jouets "fermés" ou des activités cadrées chez Minimog pour l'instant : l’intérêt dure le temps de comprendre le truc mais quand il est compris, c'est passé. C'est d'ailleurs ce qui m'a incité à ne plus acheter de jouets à mes enfants mais de prendre en parallèle un abonnement à la ludothèque (chose que je n'ai toujours pas faite et on vit très bien ainsi pour l'instant finalement). Je m'en tiens majoritairement à des jeux ouverts : poupées, jeux de construction, instruments de musique, matériel d'art, jeux d'imitation. Et ça semble lui suffire.
Il arrive d'ailleurs souvent qu'elle ne joue avec rien d'autre que son imagination et l'environnement dans lequel on se trouve. La place de l'église de notre village accueille un vieux pressoir qui fait sa joie et qui est tour à tout un château, une grotte, un mur d'escalade... 

Et quand je dis "jouer librement", quand je souhaite redonner au jeu ses lettres de noblesse, j'ai aussi envie de profiter de cet article pour encore une fois, tenter de prendre du recul face aux étiquettes.
Un enfant se met à construire un château avec des bouts de bois et bam: il pratique une activité reggio de land'art avec des loose parts nature.
Non, il joue.
Tout simplement.
Comme n'importe lequel des enfants à travers le monde.
C'est difficile de se déconditionner l'esprit de toutes les étiquettes pédagogiques que l'on intègre, même bienveillantes.
Attention, je ne suis pas devenue anti pédagogies actives, mais quand on met une étiquette sur ce que font nos enfants: je trouve qu'on plaque notre regard d'adulte et nos attentes d'adultes sur ce qui est en train de se passer alors que ce qui se passe appartient à l'enfant. Je trouve important de "des-étiqueter" les choses de temps en temps.
Je crois que, toutes voies et convictions éducatives confondues, il est bon par moments d'accepter l'idée que nos enfants puissent jouer, tout simplement, sans rien attendre de ce jeu que d'abord de voir notre enfant heureux, de participer à son bien être, de le laisser extérioriser toutes ces choses qui mûrissent en lui, librement.

J'ai envie de vous proposer un défi ^_^ 
Pour toutes celles qui nous lisent et qui n'arrivent pas à jouer, qui n'osent pas jouer, j'aimerais vous demander de vous mettre dans un endroit où vous vous sentez bien , un endroit où vous ne serez pas vu, avec ou sans vos enfants et de vous laisser aller. A rouler dans l'herbe, à "effeuiller "une pâquerette, à sauter à la corde, à viser le panier avec les balles qui trainent, à faire des bulles et sauter pour les éclater avec votre nez. Pas longtemps, le temps qu'il vous faut.

7 commentaires:

  1. Le jeu libre, oui, mille fois !
    Cependant, c'est peut-être bête, mais je n'ose pas jouer, entrer dans les histoires de mon fils par peur de parasiter son imagination en y injectant mes idées... Je ne sais pas si je suis claire, mais en participant, j'ai peur au final d'orienter son jeu et donc de le bloquer. J'ai souvent lu que le meilleur moyen de "pourrir" les jeux des enfants c'est d'intervenir dedans. Alors, que faire ? Où se trouve la limite ?

    RépondreSupprimer
  2. Quand un enfant entre dans le jeu d'un autre, il ne le "pourrit" pas, très certainement parce que sa démarhe est sincère. ON peut nourrir le jeu d'un enfant en y apportant de petites choses qui vont aller dans le sens de l'enfant et de son intérêt, et on peut simplement jouer avec lui tout en étant naturel. A mon sens, si la démarche est authentique, destinée à véritablement s'amuser et non pas à "apprendre "quelque chose à l'enfant, il n'y a aucun risque. En fait à la base c'est toujours la même chose, écouter son enfant, voir quels sont ses intérêts et lâcher prise!Et puis plutôt que de voir ça comme une injection d'idée, on peut plutot devenir une source d'inspiration, sans aller à l'encontre de son imagination et sans oublier que c'est lui qui mène le jeu au départ!

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Merci Charlie pour ta réponse. En effet, il faudrait que j'apprenne à lâcher prise et me laisser porter.
      J'y penserais à la prochaine session de jeu :-)

      Supprimer
  3. Hier, nous somme allé nous promener pour chercher des mûres... et avons tristement découvert que l'équipe municipale avait "nettoyer" les bords des chemins. Quelle déception !!
    Dans un fossé "nettoyé", mon fils (de 6 ans bientôt)trouve un pneu. Il veut le ramener à la maison. Mon instinct est de crier "NON !".
    Et puis je repense à votre article.
    Et je lui dit : "D'accords. Mais TU le ramène à la maison."
    Alors pendant plus de trente minutes, il a poussé/couru derrière le pneu, s’asseyant parfois dedans pour une pause, décrétant que c'était son nid. Aujourd'hui encore ils ont joué avec.
    Ma première réaction : mais POURQUOI leur acheter des jouets ?!
    Ma seconde : OK "loose part" ça fait snob MAIS je préfère me dire que le jardin accueille des loose part pour que mes enfants se créent un/des monde/s et explore librement leur jeu..... que de me dire "mon jardin ? quel jardin ! c'est un dépotoir" ;D

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. ce n'est pas un dépotoir ton jardin! C'est un jardin pour les enfants , faits par les enfants. Et si on veut mettre une étiquette pour faire joli, alors oui , ce pneu est un loose parts au sens originel du terme!
      As tu cet article?http://famillesenharmonie.blogspot.fr/2016/04/loose-parts_4.html

      Supprimer
    2. Ca me fait rire ton post Sofi_cerise parce que justement je cherche des vieux pneus pour notre jardin. J'adorerais en trouver le long du chemin ^_^. Y a un tas de choses super à faire avec des pneus ! Je voulais m'en servir pour le potager de ma fille mais à te lire je me dis qu'en effet, il se pourrait bien qu'on en arrive jamais à ça !

      Supprimer
  4. Mise à jour : nous avons 4 (oui quatre) pneus dans le jardin.
    Et oui, en allant chercher une cane (vivante, parce que le mâle se sentait seule suite au décès de sa femelle) chez un fermier, mon 5ans a vu... un tas de vieux pneus ! et le fermier lui en a donné 3.
    Les petits font des tours, on s'assoit dedans (si même nous), ils les font rouler... Je ne les ai jamais vu autant jouer avec un "vrai" jeu qu'avec ça !
    (si tu en cherches, pas en déchetterie, dans des garages, ce sont eux qui doivent les recolter et s'en débarrasser)

    Pour Charlie : oui, j'avais lu cet article et je lis aussi ce site là : http://www.letthechildrenplay.net/
    Mais il n'empeche qu'entre les orties plus hautes que nous, l'herbe tondue pas aussi souvent qu'on le devrait ... et le bazar des enfants, des fois je désespère :D
    (bon des fois je suis aussi super contente d'avoir autant de papillons et d'abeilles mais bon ^^')

    RépondreSupprimer